Politique
Sommet de Poznan : entre doute et espoir
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- « Il nous faut vraiment changer de vitesse, passer du débat à une phase de négociation »
La communauté internationale se réunit dès aujourd’hui et jusqu’au 12 décembre pour son grand rendez-vous annuel sur le climat. Objectif de la conférence polonaise : dix ans après Kyoto, jeter les bases d’un futur accord onusien capable d’enrayer le réchauffement planétaire. Mais les négociations s’annoncent difficiles, et les problèmes nombreux.
L’inexorable envolée du thermomètre global et son lot de soucis (sécheresses, inondations, migrations massives, maladies, fonte des glaces, montée des eaux…) va faire l’objet d’un intense débat pendant quinze jours à Poznan, en pologne. Quelque dix mille participants et près de 200 pays réunis pour poser les jalons d’un nouveau pacte de lutte contre le réchauffement devant aboutir à Copenhague en 2009 (les accords de Kyoto y seront alors remplacés). Le parcours est pourtant semé d’embûches.
Première grande difficulté dans ces discussions : la crise financière, qui préoccupe tout le monde. Et la situation économique a bon dos de nos jours quand il s’agit de justifier les désengagements environnementaux. Elle fait par exemple dire en Europe que le coût du Paquet climat-énergie sera trop élevé, remettant sérieusement ses objectifs en question (lire notre article sur le sujet : www.developpementdurable.com/politique/2008/12/A444/paquet-climat-lue-envisage-de-reduire-ses-ambitions.html). Sans parler du fait qu’un rapport de l’ONU indiquait la semaine dernière que les frais de réduction des émissions de gaz à effet de serre allaient gravement augmenter : pour une baisse d’un quart des rejets d’ici 2030, les 200 milliards de dollars par an estimés en 2007 devraient croître de 170 %.
L’Union européenne, ensuite, a très mal géré son calendrier en cette fin d’année, ajoutant un peu plus de désordre au chaos annoncé : le sommet européen qui doit finaliser les résolutions relatives au Paquet aura lieu les 11 et 12 décembre. Or ce sont les deux derniers jours de la conférence de Poznan. C’est ballot ! D’autant que le vieux continent avait réussi à s’imposer en véritable modèle des progrès climatiques.
Enrôler les nouveaux grands pollueurs
Autre complication : les pays industrialisés vont devoir convaincre certains pays en voie de développement de prendre des engagements (ce point précis fera d’ailleurs l’objet d’une table ronde ministérielle le 11). Car les pays riches, qui ont ratifié le protocole de Kyoto, sont pour l’instant les seuls à se soumettre à des contraintes de réductions des émissions polluantes (pour la période 2008-2012). Or les économies chinoise, indienne, brésilienne, sud-africaine et mexicaine en plein essor polluent désormais autant qu’au Nord.
Il va falloir de plus faire la différence entre les pays industrialisés et les autres, pour être le plus égalitaire possible, et répondre à la réclamation des premiers : distinguer les responsabilités entre les pays en voie de développement. La Chine, devenue le premier pollueur mondial, pourrait ainsi avoir à faire davantage d’efforts.
Il faudra aussi traiter les doléances de cette dernière, qui souhaite que les pays riches consacrent 1 % de leur PIB à une nouvelle aide pour le climat. Même chose pour l’Inde, qui accuse l’Occident d’avoir une responsabilité historique dans cette affaire. Et un projet d’octroi de crédits aux pays tropicaux devra être discuté pour ralentir la déforestation (20 % des rejets de gaz à effet de serre).
Les Etats-Unis vont changer la donne ?
L’Amérique de Bush a toujours refusé de s’engager dans le protocole de Kyoto. Maintenant que Barack Obama est élu, le pays va-t-il changer de point de vue sur la question ? Certaines de ses déclarations récentes, du type « attendre n’est plus une option, le déni n’est plus une réponse acceptable », le laissent penser. Et surtout, son objectif de ramener d’ici 2020 les émissions nationales à leur niveau de 1990 représente un réel espoir.
Cela dit, à Poznan, les négociations se feront encore avec une délégation de l’administration Bush, toujours en exercice. Obama, lui, sera tenu au courant des avancées du sommet par John Kerry, prochain président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat, venu en simple observateur.
Alors même si le nouveau président américain semble disposer à corriger le tir de son prédécesseur, il est très difficile de savoir si les Etats-Unis seront prêts pour la réunion de Copenhague. Faut-il y voir, comme Jean-Louis Borloo, ministre français de l’Ecologie, « un véritable changement de donne internationale » ? Possible. A condition que les choses ne traînent plus car, comme l’a déclaré Yvo de Boer, le plus haut responsable onusien du climat : « Il nous faut vraiment changer de vitesse, passer du débat à une phase de négociation ». Le temps presse, ça chauffe !
Yann Cohignac
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