Christophe Roturier, Directeur Délégué de Max Havelaar France
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Max Havelaar France, association loi 1901 à but non lucratif, se bat pour développer le commerce équitable, notamment à travers la gestion et la promotion de son label « Fairtrade - Max Havelaar ». Son Directeur Délégué, Christophe Roturier, fait le point sur cette économie solidaire, ses valeurs, ses innovations, et répond aux accusations qui sont régulièrement formulées à son encontre…
DeveloppementDurable.com : Le commerce équitable est-il impacté par la crise ?
Christophe Roturier : Effectivement, nous n’échappons pas à la crise. Nos produits font partie du marché, nous sommes donc impacté comme tous les secteurs de l’économie.
DD.com : Comment se porte aujourd’hui le label Max Havelaar ?
C. R. : Pour 2011, il est encore trop tôt pour se prononcer avec certitude. Il faudra attendre la fin de l’année. Mais nous pouvons déjà dire que nous sommes dans une croissance molle.
DD.com : Les produits équitables sont-ils forcément synonymes de qualité ?
C. R. : Un produit de mauvaise qualité, équitable ou pas, ne peut pas vivre longtemps sur un marché. Et un consommateur, même militant, recherche de la qualité. Ce que les marques et les producteurs ont compris depuis longtemps. Ces derniers, grâce notamment à la prime de développement du commerce équitable versée par les entreprises qui travaillent dans le système, se sont beaucoup investis sur le sujet. Les coopératives sud-américaines ont par exemple appris à valoriser au maximum le cacao via la très importante étape de fermentation. Ils proposent ainsi aujourd’hui des produits très haut de gamme. Idem pour le coton en Afrique de l’Ouest : seuls les produits de premier choix sont injectés dans le circuit du commerce équitable.
DD.com : Le commerce équitable est-il écolo ?
C. R. : Dans les standards du commerce équitable, il y a trois volets qui correspondent aux trois piliers du développement durable : les plus connus sont bien sûr les volets sociaux et économiques, mais on oublie souvent qu’il y a aussi un volet environnemental très important. Notre priorité est de protéger l’Homme : nous avons donc dressé une liste de produits de traitement interdits. L’environnement immédiat des producteurs est ainsi sécurisé. Mais nous élargissons également le spectre : les standards les incitent en effet à réduire leur impact de façon plus globale. La diminution des émissions de gaz à effet de serre en fait notamment partie, tout comme la lutte contre l’érosion.
Nous sommes en fait convaincus que si les hommes ne se portent pas bien, leur environnement en pâtira. Aussi, si les agriculteurs arrivent à vivre dignement de leur travail, ils deviendront les premiers protecteurs de l’environnement, car il s’agit de leur outil de travail. Nous les laissons d’ailleurs beaucoup trouver et adapter les solutions à leurs propres problèmes écologiques, qui sont très différents d’une région du monde à l’autre.
DD.com : Que pensez-vous du commerce équitable dit « Nord-Nord » ?
C. R. : C’est une très bonne initiative qui développera la consommation responsable. Nous ne pouvons que nous réjouir que nos idées, à savoir notamment la dignité des travailleurs et leur juste rémunération, fassent tâche d’huile au niveau national ou européen. Des entreprises engagées à nos côtés se sont d’ailleurs lancées dans cette activité, comme Ethiquable ou Alter Eco. Il faudra simplement veiller à ce que ces initiatives ne soient pas dévoyées. Le « fairwashing » peut par exemple être un risque. Nous y travaillons déjà, notamment dans la cadre de la Plateforme du commerce équitable, en fixant de grands principes : production de type agro-écologique, empreinte environnementale des produits réduite au maximum, revenus versés aux producteurs suffisamment rémunérateurs, engagement commercial sur la durée, projets de développement mis en place entre les producteurs et les entreprises,…
DD.com : N’existe-t-il pas un risque de concurrence avec le commerce équitable « classique » ?
C. R. : Il peut y avoir un risque de confusion pour le consommateur sur ce qu’est le commerce équitable, un problème d’appellation. Toutefois, les marques engagées à nos côtés n’emploient pas le terme « commerce équitable » pour les initiatives du Nord. Mais je ne pense pas qu’il puisse y avoir concurrence car le café, le cacao ou encore le coton ne peuvent être produits en France.
Ce qui est en revanche notre conviction, c’est que nous allons par là développer la consommation responsable. L’idée n’est ainsi pas de partager un gâteau à taille finie entre différents acteurs, mais de faire grossir la taille du gâteau pour qu’il y ait de plus en plus de consommateurs qui s’interrogent sur leurs achats et qui développent la demande. Je ne le vois donc pas comme un problème de concurrence mais comme une synergie dans les discours et les approches.
DD.com : Certains, à l’instar de l’économiste Christian Jacquiau, affirment que Max Havelaar favorise uniquement les producteurs, au détriment de leurs salariés, qui travailleraient dans de mauvaises conditions. Qu’avez-vous à leur répondre ?
C. R. : Les standards et les cahiers des charges du commerce équitable sont extrêmement claires. La discrimination, le travail forcé, le travail des enfants, par exemple, sont totalement interdits.
DD.com : On reproche également à Max Havelaar la collaboration avec de grandes multinationales, et la distribution en grandes surfaces. Ces choix peuvent-ils menacer les valeurs du commerce équitable ?
C. R. : La question de la distribution en grandes surfaces a été tranchée depuis longtemps dans notre système : nous sommes encore aujourd’hui sur un commerce de niche, même sur les produits les plus vendus comme le café arabica (part de marché de 5 à 7 %). Or nous sommes convaincus que le commerce équitable, s’il veut peser sur le marché mondial et ses règles, doit à terme réussir à atteindre une certaine ampleur. Et la vente en supermarchés peut aider à cela. Les deux tiers de nos produits sont d’ailleurs déjà vendus de cette façon, et les enquêtes de consommateurs révèlent une demande encore plus forte.
La question de la collaboration avec des multinationales est différente : il faut savoir que les règles du jeu sont les mêmes pour tous. Et nous avons besoin de travailler avec tout le monde : des PME, des grands groupes,… La taille de l’entreprise n’est pas un critère discriminant. Pour nous, ce sont l’engagement et le respect des standards qui sont importants. Cadbury, par exemple, a pris l’engagement de sourcer tout son cacao d’Afrique de l’Ouest en commerce équitable : ce n’est pas rien ! Surtout que cela fait augmenter les volumes : en deux ans, celui du café a ainsi progressé de 33 %, et celui du cacao a été multiplié par plus de trois !
Propos recueillis par Yann Cohignac
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