Denis Garnier, président-fondateur de l'association Démographie Responsable
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Dérèglements climatiques, perte de la biodiversité, morcellement des espaces naturels, épuisement des ressources naturelles… tous les maux de la planète résultent d’une cause prépondérante : la surpopulation. Rien qu’en France : 350 000 personnes de plus chaque année. Thème pas franchement à la mode dans les médias, la planification familiale a pourtant de nombreux adeptes. Rencontre avec l’un d’entre eux, Denis Garnier, le président-fondateur de l’association Démographie Responsable.DeveloppementDurable.com : Pourquoi avez-vous fondé cette association ?
Denis Garnier : Aux Etats-Unis et en Angleterre, par exemple, de nombreux mouvements font la promotion de la planification familiale. Si j’ai décidé de fonder cette association, c’est après m’être rendu compte qu’en France, nous manquions véritablement de structures identiques.
J’avais contacté, au préalable, quelques associations comme Greenpeace mais sur le sujet rien n’émergeait véritablement. D’autres, comme les décroissants, m’ont traité de tous les noms. J’ai donc décidé de prendre le taureau par les cornes et de créer la première association française de ce type.
En me rendant sur des forums, sur Internet, j’ai rapidement été galvanisé par le mouvement de fond que je ressentais dans la population. J’ai beaucoup dialogué et j’ai été vraiment surpris par tous les contacts que je nouais. C’est d’autant plus vrai maintenant que nous avons une résonnance médiatique plus importante, nous nous rendons vraiment compte à quel point les gens sont intéressés par le sujet.
dd.com : Etiez-vous déjà personnellement sensible à la pression démographique ?
D. G. : Effectivement, j’y suis sensible depuis mon adolescence et plus précisément depuis la parution du livre « La Bombe P ». Le sujet a commencé à me trotter dans la tête et depuis, ne m’a plus quitté. C’est d’autant plus étrange qu’en règle générale, les jeunes ne s’intéressent pas à ce genre de problématique, ils y sont en tout cas moins sensibles. Mais attention, je ne suis pas l’exception qui confirme la règle, nous avons, au sein de l’association, de jeunes militants. Mais globalement, c’est plutôt vers 40 ou 50 ans que l’on commence à s’y intéresser de plus près.
dd.com : Selon vous, la pression démographique est-elle la première cause de tous les maux de la planète ?
D. G. : Oui, je le pense. Que ce soit le dérèglement climatique, causé par les rejets massifs de gaz à effet de serre de nous autres consommateurs occidentaux (et chinois !), la perte de la biodiversité, l’insécurité alimentaire et les problèmes de l’eau : la responsabilité n’en incombe qu’à la pression démographique. La population s’étend, prend possession de territoires toujours plus vastes, repousse incessamment ses propres limites. Si nous étions moitié moins, ce qui n’est plus possible du tout, nous n’aurions jamais eu tous ces problèmes.
dd.com : Vous incitez à ne pas dépasser les 2 enfants par foyer. N’est-ce pas contradictoire avec le recul de la pression démographique pour lequel vous militez ?
D. G. : Non, je ne pense pas. Si nous arrêtions de procréer, nous provoquerions des cassures dans les pyramides démographiques. Et attention, les 2 enfants que nous prônons, ce n’est pas une moyenne, c’est un seuil. Sachant que certaines femmes ne peuvent ou ne veulent enfanter, le taux de natalité ne dépasse pas les 1,7 enfant. Nous amorçons ainsi une lente mais nécessaire décroissance. Bien sûr, nous parlons des pays occidentaux mais nous aimerions parvenir au même résultat sur toute la planète.
dd.com : Que prônez-vous concrètement pour réduire la pression démographique ?
D. G. : Un concept basique et déjà mis en œuvre par l’UNFPA, l’agence des Nations unies pour la population : la planification familiale. Dans le détail, nous prônons donc la gratuité de la contraception, l’espacement des naissances et l’instruction des femmes. Et de ce point de vue là, les lacunes sont abyssales. L’instruction des femmes, ne s’agissant que de l’école primaire, dans certains pays, ne dépasse pas les 70 %. Et de toute façon, les études prouvent bien que l’école primaire ne suffit pas à réduire les naissances. Si, pour une population donnée, les femmes font en moyenne 6 enfants, l’instruction primaire ne fera redescendre ce chiffre qu’à 5. D’où l’importance de l’enseignement secondaire. Et là, les résultats sont bien pires. Dans certains pays, seules 10 à 20 % des femmes suivent l’enseignement secondaire.
dd.com : Soutenez-vous des initiatives en faveur de l’instruction ?
D. G. : Evidemment ! Dès que nous le pouvons, nous nous exprimons sur le sujet. Nous menons d’ailleurs un partenariat avec une association béninoise qui intervient dans le secteur agricole et essaient de conscientiser les populations. Mais ce soutien n’en est encore qu’à ses balbutiements. Nous n’existons que depuis 2 ans, il ne faut pas l’oublier !
dd.com : Vous avez mis en ligne une pétition en faveur de la gratuité de la contraception. En êtes-vous satisfait ?
D. G. : Au départ nous ne nous étions pas fixés d’objectifs. Mais nous sommes relativement satisfaits de nos 3 000 signatures, même si nous savons pertinemment que nous n’allons pas changer le monde. Nous l’enverrons tout de même à l’UNFPA. Internet, c’est un excellent moyen de communication mais certaines personnes n’y ont pas accès. De plus, les pétitionnaires sur Internet forment un véritable microcosme qu’il n’est pas aisé d’attirer.
Toutefois, les signataires ont laissé de nombreux commentaires sur la démographie, signe qu’ils y sont sensibles. Quand bien même la pétition n’était pas du tout axée sur ce problème-là. C’est un sentiment diffus dans la population mais qui n’est malheureusement pas du tout représenté par le milieu politique, ni médiatique.
Au moins, maintenant, nous avons les contacts de 3 000 personnes sensibles à notre cause !
dd.com : L’Insee vient de publier son rapport sur la démographie française, nous sommes plus de 65 millions deFrançais…
D. G. : Effectivement, notre pays compte 350 000 personnes de plus par an, soit l’équivalent d’une ville comme Nice. Certes, on ne construit pas de villes nouvelles, mais on s’étend. J’ai fait le calcul et il est impressionnant : tous les 10 ans, c’est un territoire de la taille du département de l’Isère qui disparaît sous la pression démographique. Impossible ensuite de le récupérer, c’est dramatique !
dd.com : L’extension urbaine s’opère très souvent au détriment des zones cultivables. L’homme est donc un véritable danger pour l’homme ?
D. G. : C’est totalement sidérant ! Tout comme le problème de l’aménagement du territoire. Avouons que nous ne sommes pas obligés de construire des golfs ou des ronds-points ! Nous devrions construire en hauteur au lieu de nous embourber dans une politique de maisons individuelles. Et en parler dans les médias ne sert à rien, rien ne bouge. La petite histoire dont je viens de vous parler, sur la perte d’un territoire de la taille de l’Isère, elle a été mentionnée à la télévision, mais croyez-vous que cela ait servi à quelque chose ? A rien du tout ! Personne ne s’indigne, personne ne s’élève ! 350 000 personnes de plus chaque année, et tout le monde s’en félicite. Il faudra pourtant que la machine finisse par se gripper !
dd.com : Pourquoi l’augmentation des richesses est-elle inversement proportionnelle à celle de la natalité ?
D. G. : Grâce à l’instruction. Avoir des enfants, c’est merveilleux mais l’équilibre entre son épanouissement individuel et sa vie familiale est parfois dur à trouver. Dans nos pays, la femme décide plus ou moins du nombre d’enfants qu’elle souhaite avoir. Et elle l’établit en tenant compte de son épanouissement personnel. Dans les pays du Sud, c’est tout le contraire. Le milieu familial incite les couples à enfanter, et souvent, pour le mari, c’est une preuve indéniable de virilité. Justement, sur ce sujet, j’ai eu l’occasion de visionner un clip congolais faisant la promotion de la planification familiale et tournant en dérision un homme qui se pavanait avec une ribambelle d’enfants, fier de montrer sa puissance !
Propos recueillis par Albane Wurtz
Pour consulter le site de Démographie Responsable, cliquez ici
Pour écouter le Commandant Cousteau, sur le plateau d'Anne Sinclair en 1974, c'est par ici
Derniers commentaires :
- odim, 14 / 05 / 2011 - 9:20
- “De savoir si les populations Européennes sont ou non responsables dans l'explosion démographique de l'Afrique, peut donner lieu à débattre, mais il y a plus urgent. Pourquoi ne pas instaurer, à l'instar de la conditionnalité verte de Rio à l'égard des pays qui ferme un peu trop les yeux sur la déforestation de leur territoire? Il serait bon et même urgent en effet de réfléchir à la mise en place d'une conditionnalité démographique, où les aides financières de l'UE ne seraient accordées qu'à partir d'une implication significative des pays un peu trop prolifiques, dans un réel programme de décroissance démographique. Cette croissance démographique tous azimuts qui doit être considérée aujourd'hui comme un déli de mise en danger de tout le vivant de la planète. Les dirigeants de ces pays seraient bien obligés de se pencher sur ce problème au lieu de détourner ces fonds dans la trentaine de paradis fiscaux encore en activité de nos jour, véritable gangrène de notre société.”
- marpa, 01 / 02 / 2011 - 15:19
- “Bonjour à tou-te-s,
Avant de passer à des critiques qui risqueraient d'être prises au premier degré, je tiens à préciser que je suis totalement d'accord avec les analyses faites sur la surpopulation et sa conséquence sur notre planète. Dans ce domaine il reste en effet beaucoup d'actions à mettre en place afin de conscientiser les populations et trouver à terme un équilibre.
Je serais curieux de savoir si Denis Garnier ainsi que les membres de son association vivent tous dans des immeubles...
En effet quand on se permet d'annoncer que "nous devrions construire en hauteur au lieu de nous embourber dans une politique de maisons individuelles", il faut appliquer ce que l'on prône...
Personnellement, je ne pourrai me résoudre à faire vivre mon enfant dans une tour de béton et dans un milieu ultra-urbanisé.
De plus, je préfère vivre dans une maison individuelle avec un jardin et agir sur cette terre pour la rendre plus viable et plus accueillante pour la biodiversité locale que de laisser ces surfaces à des promoteurs pour qu'ils y construisent hlm, hangars et autres zones commerciales.
Le problème est-il vraiment là ???”
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