La naissance de l’IPBES s’annonçait imminente : 90 pays, dont le réticent Brésil, avait en effet approuvé en juin dernier, en Corée-du-Sud, le principe de sa création.
Coup de théâtre : le 7 septembre, la Chine et le représentant des pays du G77 ont fait savoir qu’ils jugeaient « prématuré » de mettre cette question à l’ordre du jour de l’assemblée générale de l’ONU. La porte n’est pourtant pas tout à fait close : le groupe des 77 et la Chine pourraient « examiner » la possibilité de la mise en œuvre de l’IPBES, mais seulement après la conférence sur la biodiversité de Nagoya (Japon), en octobre prochain.
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Ce soudain pas en arrière est considéré comme stratégique. La conférence de Nagoya a en effet pour but d’organiser l’accès des pays industrialisés aux richesses végétales et animales des pays en développement (rappelons que la plus riche biodiversité se trouve dans les pays du Sud). Les Etats du G77 poseraient comme condition à la création du « Giec de la biodiversité » l’équité des futurs accords. Une façon de faire qui agace la secrétaire d’Etat à l’Ecologie, Chantal Jouanno qui déclarait à l’AFP : « Certains essayent de prendre l’IPBES en otage ».
Reste que ce statu quo est plutôt fâcheux puisque l’érosion de la biodiversité est devenue une source d’inquiétude…
Drame écologique, drame économique
L’érosion de la biodiversité est un sujet grave qui a longtemps été perçu comme secondaire en comparaison du réchauffement climatique. Pourtant, les scientifiques tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme : le rythme actuel de perte d’espèces dû aux activités humaines est « plus de 100 fois supérieur à celui de l’extinction naturelle », selon l’ONU. Le rapport Sukhdev, chargé d’évaluer les coûts économiques du déclin progressif de la biodiversité, estime, quant à lui, que « d’ici 2050, une diminution de 11 % des zones naturelles restantes en 2000 est à craindre. (…) Près de 40 % des terres actuellement exploitées pour des formes d’agriculture peu intensive pourraient être converties en terres d’agriculture intensive, ce qui entrainerait des pertes supplémentaires de biodiversité. Enfin, 60 % des récifs coralliens risquent de disparaitre d’ici 2030 du fait de la pêche, des maladies, des espèces allogènes envahissantes et du blanchissement des coraux lié au changement climatique ».
Or 40 % de notre économie dépend directement de la biodiversité (nourriture, eau, fibres, médicaments…). Son érosion signifie donc une perte de services rendus par la nature et représente un péril alimentaire et économique. Ce sont les populations les plus fragiles qui en pâtiront le plus. Voila pourquoi il est tout à fait étrange que les pays du G77, dont certains sont les potentielles premières victimes du déclin de la biodiversité, bloquent l’IBPES, véritable outil de lutte contre tout scénario catastrophe.