A la veille de la 11ème Quinzaine du commerce équitable (14 au 29 mai), les représentants de ce réseau international proposent leur modèle commercial comme source d’inspiration pour les dirigeants du G20. Le point fondamental soulevé est la régulation des prix des produits. Un sujet tout à fait d’actualité à l’heure où le cours des matières premières franchit des sommets.
La Quinzaine du commerce équitable se tiendra du 14 au 29 mai 2011 : consommation responsable et solidarité internationale en seront les thèmes majeurs
La conférence qui s’est tenue ce jeudi 5 avril à la Maison de l’Amérique Latine, à Paris, a réuni des représentants de producteurs des pays du Sud connectés à l’organisation Fairtrade/Max Havelaar. L’Amérique Latine, l’Afrique et l’Asie étaient représentées : trois continents qui ont su développer d’importants réseaux de commerce équitable. Leurs responsables en ont profité pour faire part de leur réflexion sur la nécessité d’instaurer une nouvelle donne commerciale. D’après eux, les décideurs du G20 devraient s’inspirer des principes du commerce équitable, un système éthique qui fonctionne et qui ne cesse de s’accroître : le label Fairtrade/Max Havelaar génère en effet à lui seul 3,4 milliards d’euros de chiffres d’affaires et fait travailler 1,5 million de personnes dans le monde. Instaurer un prix minimum d’achat des produits aux producteurs et imposer des garanties sociales et environnementales sont les principes qui régissent ce système…
Dans un contexte de volatilité des prix agricoles, les représentants des trois grands continents producteurs de denrées alimentaires du Sud s’accordent sur le fait que le G20 doive opter pour des mesures de régulation des prix. « Les gens pensent qu’avec les prix actuels, les producteurs s’enrichissent », fait remarquer A. Yorokamu, Président du conseil d’administration de Fairtrade Africa (AFN). Mais « c’est bien sûr faux ». La raison : la libéralisation des marchés, imposée notamment par le FMI. « Avant, quand les prix grimpaient, on vendait les surplus de récoltes. Et s’ils baissaient, on stockait. La propriété des stocks est passée dans les mains d’acteurs privés qui spéculent dessus ». La compétition féroce qui s’est installée conduit ainsi à la volatilité du marché que nous connaissons actuellement.
Lorsque les prix ont chuté, comme lors des deux grandes crises du café des années 80 et 90, certains paysans ont été contraints d’arrêter leur production, voire d’abandonner leurs terres. Alors que ceux qui étaient rattachés à une fédération de commerce équitable ont pu bénéficier d’un prix de rachat juste de leur récolte et poursuivre leurs activités… « Outre un accès à l’indépendance, le principal effet des coopératives est de mieux absorber les chocs », explique A. C. Amabtipudi, membre du bureau du réseau de producteurs asiatiques (NAP).
La hausse des prix déstabilise les coopératives
En cas de hausse rapide des prix, « les coopératives qui appartiennent aux producteurs ont du mal à rassembler rapidement les liquidités nécessaires pour payer les récoltes », précise M. Lopez, trésorier de la fédération latino américaine (CLAC). « Commence alors une concurrence déloyale : les acteurs financiers qui ont de vastes intérêts vont voir directement les agriculteurs pour leur proposer de racheter leur production en cash ». Certains membres du réseau, qui ont des besoins immédiats, acceptent ces propositions par nécessité. Ils ne le feront que quelques fois, irrégulièrement, mais cela suffit à affaiblir tout le système du commerce équitable. « Le scénario qui se passe en ce moment ruine tous nos efforts », à savoir un labeur de plus de 30 ans…
L’impact des changements climatiques sur les récoltes
Les différents représentants ont également tiré la sonnette d’alarme sur les changements climatiques. De plus en plus fréquents et violents, ils impactent considérablement les récoltes. « Malgré tous les efforts qui ont été faits sur les pratiques environnementales de production, ça n’est pas suffisant », déplore le représentant d’Amérique Latine. « Les cycles de production sont bouleversés. L’aspect majeur est la pluie qui ne tombe ni assez ni au moment où on l’attend. Si ça continue, on produira moins chaque année ». Dans ce contexte, l’insécurité alimentaire devient une question globale. La limitation de l’érosion des sols et des semences ont également été désignées comme des priorités. Mais tout cela nécessite d’importants investissements financiers.
Pistes préconisées par le commerce équitable à destination des décideurs du G20 :
- Réinventer les politiques de prix
- Revoir les investissements
- Promouvoir les organisations qui appartiennent aux producteurs et non aux investisseurs privés
- Prendre en compte les changements climatiques